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Le retour de la théorie de la connaissance acquise en droit de l’urbanisme
Le 04 mai 2016L'exercice par un tiers d'un recours administratif ou contentieux contre un permis de construire montre qu'il a connaissance de cette décision et a, en conséquence, pour effet de faire courir à son égard le délai de recours contentieux, alors même que la publicité concernant ce permis n'aurait pas satisfait aux exigences prévues par l'article A. 424-17 du code de l'urbanisme.
De longue date la jurisprudence considère que l’auteur d’un recours juridictionnel tendant à l’annulation d’une décision administrative doit être réputé avoir eu connaissance de la décision qu’il attaque au plus tard à la date à laquelle il a formé son recours (voir notamment en ce sens CE, 3 décembre 2012, n°357330 ; CE, 11 décembre 2013, n°363361).
Tel est également le cas lorsqu’une personne forme un recours administratif à l’encontre d’une décision (voir notamment en ce sens CE, 13 mars 1998, n°120079).
C’est ce que l’on appelle la théorie de la connaissance acquise.
Pourtant, on a pu noter un recul progressif de l’application de cette théorie et de ces effets en matière d’opposition des délais de recours contre une décision administrative.
Il a ainsi notamment pu être considéré que si la formation d’un recours gracieux implique que l’intéressé a eu connaissance de la décision contestée, cette seule circonstance ne suffit pas à faire courrier le délai de recours contentieux si la décision en cause ne mentionne pas les voies et délais de recours (même arrêt).
La décision commentée va dans le sens d’un regain de vigueur de la théorie de la connaissance en matière d’urbanisme.
En l’espèce, le panneau d’affichage d’un permis de construire ne faisait pas mention des voies et délais de recours.
En principe, et conformément aux dispositions de l’article R. 600-2 du code de l’urbanisme, aucun délai n’était donc opposable aux tiers pour former un recours à l’encontre de ce permis.
Le Conseil d’Etat a tout d’abord rappelé que : « (…) la mention relative au droit de recours, qui doit figurer sur le panneau d'affichage du permis de construire en application de l'article A. 424-17 du code de l'urbanisme, permet aux tiers de préserver leurs droits (…) ».
Avant d’ajouter : « (…) que, toutefois, l'exercice par un tiers d'un recours administratif ou contentieux contre un permis de construire montre qu'il a connaissance de cette décision et a, en conséquence, pour effet de faire courir à son égard le délai de recours contentieux, alors même que la publicité concernant ce permis n'aurait pas satisfait aux exigences prévues par l'article A. 424-17 du code de l'urbanisme (…) ».
Le raisonnement est donc clairement inversé.
Dès lors, toute personne qui a formé un recours gracieux ou hiérarchique à l’encontre d’un permis de construire devra s’assurer de former un éventuel recours contentieux dans les délais adéquats, en cas de rejet de son recours.
A défaut de respecter ces délais, sa requête risque d’être rejetée comme étant tardive comme cela a été le cas en l’espèce.
Un pas de plus est donc encore opéré vers une plus grande protection des autorisations de construire et lotir.
Références : CE, 15 avril 2016, n°375132 ; CE, 3 décembre 2012, n°357330 ; CE, 11 décembre 2013, n°363361 ; CE, 13 mars 1998, n°120079